Quand j’étais enfant, le miracle de la vie me réjouissait et je ne pouvais pas m’endormir sans faire une longue prière et je me rappelle que dans cette prière je ne voulais rien oublier. Je priais pour toutes les créatures qui étaient sur terre, toutes celles qui étaient mortes et toutes celles qui allaient vivre et je réfléchissais de tout mon cœur pour savoir si c’était suffisant. Parce que je savais déjà que la prière était un manteau et qu’il fallait que tout le monde soit à l’abri…

Il y a des histoires d’amour solaires, il y a des histoires d’amour à la vie à la mort, sans faux-semblants qui sont juste le quotidien, le concret, comment faire en sorte que l’autre soit le mieux possible, le plus heureux possible, s’achemine sans encombre vers sa vie. Il y a des histoires d’amour qui sont la réalité, qui parlent de tous les jours et de toutes les nuits, de toutes les maladies, de toutes les vieillesses, de toutes les faiblesses, de toutes les peurs. Des histoires d’amour de gens qui s’accompagnent malgré la détresse, malgré la folie, malgré le mal et jusqu’à la mort.

Comme dans les chansons de Dalida je place l’amour au-dessus de la moyenne. Il paraît que la moyenne c’est l’endroit où on vit, la place médiocre dans laquelle le monde s’étale comme si il n’y avait pas d’ailleurs. Alors que tout est partout quand on a la foi, quand on a la foi tout rayonne, les frontières sont abolies, les pays balayés et le cœur est complet quand il aime tout.

Quand le cœur n’est pas complet, on a des cernes, on est cerné. On croit que la hasard existe et on ne donne plus de sens à la vie. Ce n’est pas parce que nous manquons de choses matérielles que nos sociétés sont malheureuses mais c’est parce que nous n’avons plus de sens, de direction, de chemin.

J’essaye toujours d’avoir dans mon coeur ma prière de petite fille pour que mon coeur ne meure pas justement malgré la mort qui crie partout, pour qu’il soit complet comme quand je vois la mer à perpétuité…

l y a des hommes et des femmes qui donnent encore envie de prier et je me sens tous les jours comme un torero qui rentre dans l’arène de la vie et je ne peux pas détacher mes yeux de l’autel de ma foi avant de franchir le seuil de ma porte.

Trois hommes traversent des pays pour sauver une petite fille. Bien sûr on pourrait réfléchir à l’infini sur la meilleure façon de traverser, sur l’état des routes, sur l’itinéraire, sur quels sont les recours officiels quand une vie est en danger et puis sinon on peut prendre sa voiture et rouler jusqu’à chez elle et la sauver…

De temps en temps il y a encore des histoires d’amour qui en valent la peine et sinon il y a des imbécillités intellectuelles, des narcissisme nés de l’ennui qu’on appelle amour sur grand écran et qui ne veulent rien dire.

Alors trois hommes traversent des pays pour sauver une petite fille et tout le voyage ressemble à un conte de fées parce que la foi de ces trois hommes et de la terre entière est dans le moteur de la voiture. Bien sur des fois il y a des tronçons de route de 250 km dans la nuit noire, dans les forêts, bien sûr il y a 3000km à parcourir, bien sûr il y a des frontières, bien sûr il y a cette petite fille qui doit juste avoir confiance en ces trois hommes et les suivre mais c’est la foi de tous qui conduit, plus la voiture.

On aimerait mieux avoir la foi que de ne rien croire et pourtant c’est tellement fatiguant d’avoir la foi, de continuer là où tout le monde s’arrête, de garder ses seules valeurs quand personne ne croit à ce qu’on sait être vrai.
Et au lieu d’écouter son cœur on pourrait rejoindre le monde des théories et des abstractions, se mettre dans la case qui nous correspond et regarder depuis cet emplacement si le champs est assez dégagé pour émettre une hypothèse ou un avis.
Il y a tellement d’actions concrètes à mener du matin au soir plutôt que de s’interroger sur tous les sujets. Si seulement le cœur commandait…

J’écoute Dalida et du flamenco brûlant et je vis ma vie en note majeure parce que mon cœur est dans la prière et que la foi est ma loi et que l’amour est ma maison et j’agis comme si j’allais mourir tout à l’heure et c’est ma plus belle déclaration d’amour au monde.
Il y a un homme qui aimait une seule femme et qui ne voulait rien d’autre que son bonheur à elle et si elle aimait un autre homme il faisait tout pour que cet autre homme aime la femme qu’il aimait et il ne comprenait pas tous les enfantillages qu’on appelle amour ici.

Il y a une maman qui va à la crèche et qui est tellement heureuse que son bébé rencontre d’autres enfants et pendant ce temps là d’autres mamans pleurent parce qu’elles ne vont pas voir leur bébé pendant quelques heures.

Il y a un chien qui attrape un cancer en même temps que son maître et il ne peut pas supporter la maladie de celui qui lui a tout donné. Il y a un vieil homme à l’hôpital qui aimerait bien voir ses enfants plus souvent même s’il sait qu’il n’a pas assez d’une vie pour se faire pardonner la sienne.

Pas besoin de boire et de prendre de la drogue pour aller au cœur de la sensation de son cœur. Juste regarder les hommes et les femmes vivre autour de nous, les animaux aussi, les créatures, les créations, tous les bienfaits. Les regarder et faire preuve de générosité envers ce que la vie nous offre de plus beau à chaque seconde.

Je pense à l’histoire de la grappe de raisins qui parle aux vieux sage et qui se plaint que les hommes sans cesse viennent la piller au moment de faire du vin sans jamais la remercier, sans jamais montrer de reconnaissance à son égard, et le vieux sage de lui répondre : « peut-être qu’ils pensent que tu ne peux pas t’empêcher de faire du raisin ? »

Et je trouve que les problèmes écologiques signent un manque de reconnaissance évident, un manque de générosité. Comment les résoudre si les cœurs ne s’ouvrent pas ? Aucune loi n’en viendra à bout si on ne se rend pas compte qu’une moitié de la journée sert à dire merci et l’autre moitié à agir en rapports avec les bienfaits dont on est comblé à partir du moment où on est en vie. Dire merci c’est prier, c’est donner de la valeur à ce qui existe, c’est rendre sacré la vie. Et la réalité est sous-tendue par l’intention des cœurs et sans cette équation primordiale aucune flèche n’atteint sa cible. Sans amour, sans présence pure, les conditions élémentaires ne sont pas réunies pour qu’aboutisse une action de bien. Les conditions élémentaires : élément terre…

Ce qui est possible est au bout de notre foi et de notre amour, pas dans les textes de lois, pas dans les limites que le monde s’est imposé.

Je pense aux Prophètes, paix et salut sur eux, ces hommes de rien, qui avaient toute la noblesse de cœur qui permet de servir le monde, qui avaient pour seul héritage une filiation de cœur de lumière que j’appelle de tous mes vœux pour ceux qui sont autour de moi.
Il y a des histoires d’amour solaires, qui emportent tout sur leur passage, qui sont la simplicité même, l’amour même, qui habitent véritablement les cœurs de ceux qui les vivent, qui transportent des petites filles du danger à la lumière. Il y a des histoires d’amour qui sont des moyens de locomotion, qui sont des bateaux, des routes, des vêtements, des caresses, des nourritures. Il y a des histoires d’amour qui réparent de la faim et de la soif pour toujours, qui réparent des brutalités et des échecs, qui nettoient le cœur, qui soufflent sur les peines, qui se plantent comme des arbres de 200 ans d’âge dont les racines vont jusqu’au centre de la terre et les branches jusqu’au ciel et elles sont l’action même, la vérité même, elles embrassent la vie et elles anéantissent toutes les ombres sur leur passage et leur écho dans le monde est une prière…

Toutes les histoires d’amour méritent qu’on fasse une prière d’enfant, celle du cœur complet, celle qui n’oublie rien ni personne. Tout le monde a une prière au fond de son coeur même si elle n’a jamais été dite encore. Une phrase qui vient malgré nous quand la vie nous tamise pour donner la farine du pain de l’amour. Et en voyant la mer, je me rappelle de ces trois hommes qui ont ramené une petite fille pour qu’elle commence une vie bien à elle. Je me rappelle des Prophètes, paix et salut sur eux, qui agissaient au quotidien pour le bien-être de tout ce qui vivait. Et je pense à l’épître de Paul aux corinthiens : « J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, J’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour je ne suis rien. J’aurai beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurai beau me faire brûler vif, si il me manque l’amour cela ne sert à rien. L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, il ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, Il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout… »